Le bonheur est dans le blé  ?

SALAIRE & BIEN-ÊTRE AU TRAVAIL
Le bonheur est dans le blé  ? sur Qu'est-ce qu'on fait
L ’argent ne fait pas le bonheur, mais il y contribue, paraît-il. L’adage se révèle d’autant plus vrai dans 
la vie professionnelle. Si de nombreuses études 
tendent à démontrer que le salaire n’est pas 
le principal facteur de motivation au travail, 
il est en revanche le premier motif 
d’insatisfaction pour 55 % des salariés français. 
Logique, c'est une composante essentielle 
du bien-être au travail  : la reconnaissance  !

Le salariat n’a pas toujours existé. Mais dans notre modèle économique contemporain, il est la forme principale de rémunération des individus. Un salaire, c’est bête et méchant : c’est la contrepartie pécuniaire d’un travail fourni. Alors logiquement, tout le monde devrait percevoir la même rétribution à travail égal non ? Évidemment les choses ne sont pas si simples… Si la rémunération s’attache à des critères objectifs et tangibles (l’âge, donc l’expérience, le diplôme, la qualification requise, le volume d’heures travaillées…), elle est avant tout le fruit d’une négociation entre deux parties prenantes avec ce que cela comprend de critères subjectifs. Un flou entretenu par le tabou qui entoure le salaire en France : difficile d’apprécier sa justesse quand on ne connaît pas le salaire perçu par nos collègues à niveau d’expérience et responsabilité égales. Et difficile encore de négocier son salaire à l’embauche dans un monde professionnel ultra-concurrentiel.

À partir des années 90, on s’aperçoit aussi que les augmentations générales de salaire vont être progressivement remplacées par des augmentations individualisées. C’est l’avènement du chacun pour soi, avec un avantage certain pour les employeurs : plus le statut des salariés est individualisé, moins la revendication sociale collective peut s’organiser. 

Selon l’INSEE " l’appréciation du salaire normal est, toujours à salaire égal, influencée par d’autres perceptions subjectives". Par exemple, les hommes, pourtant mieux payés que les femmes sont plus insatisfaits qu’elles de leur salaire : les femmes intérioriseraient donc les écarts au point de les inclure dans l’appréciation du salaire qu’elles trouveraient normal de percevoir. On retrouve un décalage similaire chez les enfants de cadres qui, à rémunération égale par rapport aux enfants d’employés, estiment que leur salaire " normal" devrait être supérieur de 4 %.

Les augmentations générales de salaire vont être progressivement remplacées par des augmentations individualisées.

Alors, comment savoir si l'on est "normalement" rémunéré ? Quel est le salaire moyen français ? Quels critères déterminent à tort ou à raison notre rémunération ? Le panorama de la rémunération des salariés français livre quelques indices :

On touche la bonne paie ! Notre salaire n’étant pas basé sur l’utilité sociale de notre travail, ni sur sa pénibilité, ni sur la capacité de production individuelle, comment définit-on une juste rémunération ?

Salarié, on estime que notre rémunération n’est pas à la hauteur de nos expériences et compétences ?

Tout commence dès l’entretien d’embauche, moment crucial de négociation du salaire. Le manque d’information ou la peur d’être " trop cher"  entraîne souvent la sous-estimation des prétentions salariales. Pour éviter cet écueil, il faut savoir ce que l’on vaut vraiment. Alors, avant d’accepter une proposition, on liste les critères qui déterminent notre valeur sur le marché du travail : expérience, maîtrise et/ou rareté de mes compétences, localisation, etc. On n’hésite pas à demander une description précise de la fiche de poste (complexité des missions, niveau de responsabilité, volume de travail) avant de la comparer avec d'autres offres similaires sur le marché. On peut aussi s’appuyer sur des simulateurs en ligne (juritravail.com ou apec.com) pour mieux évaluer ce que vaut le poste. Mais pour être fixé, rien ne vaut un benchmark maison : on brise le silence et on pose la question autour de soi. Déjà en poste ? Il va falloir dépasser ses appréhensions pour demander une augmentation. Pour maximiser ses chances, mieux vaut choisir le bon moment (lors de l’entretien annuel ou en fin d’année avant que les budgets ne soient bouclés) et construire une argumentation béton à base d’accroissement de la masse de travail et des responsabilités, de bons résultats, de développement de nouveaux projets ou produits. Par contre, on évitera de se comparer aux autres salariés, d’exiger un montant sans négociation ou d’évoquer sa situation personnelle lors de l’entretien. Enfin, même si la rémunération est plus individualisée que jamais, il est encore possible de négocier le salaire collectivement. Alors que moins d’un Français sur deux estime les syndicats utiles, ce sont pourtant eux qui dans les entreprises de plus de 50 salariés, représentent leurs intérêts, négocient les conventions collectives et peuvent œuvrer pour une rémunération plus juste. Il y a donc tout intérêt à se renseigner auprès de ses représentants pour faire valoir ses droits collectivement.

Chef d’entreprise, on souhaite répartir plus ÉQUITABLEMENT les bénéfices ?

Avec de telles velléités, on ne fait pas partie de la norme. Dans le monde, l’écart entre les salaires des chefs d’entreprise et des employés n’a jamais été aussi important. Rien qu’en France, les grands patrons perçoivent en moyenne 132 fois plus d’argent que leurs salariés. Pour l’économiste Gaël Giraud, de tels écarts sont dommageables pour le lien social. Dans Facteur 12, coécrit avec Cécile Renouard, il explique que ceux-ci ont un véritable coût pour les finances publiques obligées d’intervenir pour compléter les faibles salaires. Et si beaucoup d’entreprises se targuent de vouloir améliorer les conditions de travail de leurs employés, elles oublient souvent d’aborder la question des revenus. Pour la start-up tech anglaise Buffer, c’est la transparence qui serait la clef d’un bon système de rémunération. En 2013, elle décide de publier tous les chiffres de l’entreprise, y compris les formules de calcul de toutes les rémunérations. À travers cette démarche atypique, l’entreprise poursuit une autre valeur qui lui est chère : la confiance. En France, le cabinet de conseil en ressources humaines Codesiom a créé un outil pour aider les entreprises à remettre à plat leur grille de salaire et à la rendre plus équitable. Le calcul s’appuie sur un outil de cotation qui intègre tous les paramètres déterminants : le niveau de complexité et de responsabilité de la fonction, le niveau de formation et d’expérience du salarié, la communication induite par la fonction (interne ou externe), l’impact direct ou indirect sur le chiffre d’affaires, ainsi que le niveau de performance de l’employé (réparti sur neuf niveaux de débutant à expert). C’est donc en toute transparence que la rémunération la plus équitable est déterminée par cette gigantesque matrice. Avec un double avantage : les collaborateurs ont le sentiment que leur salaire est cohérent avec ceux de leurs collègues et les ressources humaines peuvent les calculer plus précisément et anticiper leurs évolutions. Finalement, le travail c’est un peu comme la gymnastique, il faut savoir passer du grand écart à l’équilibre. Après tout, on nous demande bien d’être souples.

Camille Cazanave
Illustrations : Jacques Floret
Tags : #travail
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