Additifs dans le vin : la coupe est pleine
" Le vin est le produit exclusif de la fermentation du raisin frais ou du jus de raisin frais ". C’est la loi (Griffe, 1889) qui le dit. La fermentation, c’est la transformation du sucre des baies en alcool sous l’effet de levures. À l’origine de la vinification, on trouve donc de la chimie naturelle, mais celle-ci ne saurait, à elle seule, suffire à faire un bon vin. Outre le terroir et le cépage, le vin est aussi le produit du savoir-faire de vignerons et, parfois, de produits de synthèse comme le stabilisateur Polyvinylpolypyrrolidone, dit PVPP de son petit nom. Mais aussi d'épaississants ou d'enzymes qui suscitent la méfiance de certains scientifiques. Tout ceci fait partie des 49 additifs autorisés chez les vins conventionnels, contre 38 pour les productions bios, 5 pour la biodynamie et un seul, à faible dose pour le vin naturel, le dioxyde de soufre (E220 sur les étiquettes). Ceux-ci ne seraient pas nocifs, selon les critères de l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) tant que la dose journalière admissible (DJA) par personne est respectée – bien que celle-ci varie grandement selon le consommateur…
Source : les vins s.a.i.n.s
De la vigne à la mise en bouteille, la chimie du vin
En viticulture, l’usage de produits de synthèse est assez récent. Au XIXe siècle apparaissent nuisibles et maladies de la vigne qui déciment le vignoble français. Suite à cette crise se développe la viticulture moderne, soit l’usage intensif de produits phytosanitaires pour protéger la vigne. En vinification, en revanche, le recours à des produits exogènes pour modifier le goût du vin ne date pas d’hier. Dès l’Antiquité, les Romains mettent au point des procédés pour donner à des vins jeunes le goût de vins anciens et éviter ainsi d’avoir à patienter durant les longues périodes de vieillissement du vin avant dégustation. Les composés du soufre sont également utilisés dès cette époque pour éviter que le vin ne tourne au vinaigre.
Parce que le consommateur est roi depuis (presque) la nuit des temps, les professionnels du vin adaptent leurs produits pour le plus grand plaisir des palais gourmets. Catherine Vergé, présidente de l’association Vins S.A.I.N.S (Vins Sans Aucun Intrant Ni Sulfite ajouté) détaille : "Le vin est un produit de luxe. En cela, il n’est pas nécessaire de préciser sa composition sur l’étiquette, à l’exception de Contient des sulfites ".
Au départ, la chimie de synthèse, c’est l’entrée de la viticulture et de la vinification dans l’ère moderne : moins de fatigue pour les vignerons dans l’entretien du vignoble et moins de risque de voir la production de l’année partir en fumée à cause, par exemple, d’une mauvaise météo ou d’une oxydation du vin. Désormais, grâce à la chimie de synthèse, tout se contrôle. Si, en vinification, les intrants donnent aux producteurs un pouvoir sur la qualité de leur vin, ils sont aussi l’assurance de pouvoir produire à très grande échelle un goût reconnaissable entre mille. Un argument marketing non négligeable. Que l’on soit en France ou au Japon, on aura la garantie d’un goût unique, stable, lisse. Et c’est là que le bât blesse. À l’inverse, pour Catherine Vergé, " les vins sans intrants sont différents selon le climat de l’année. Les vignes plongent dans le sol pour se nourrir du terroir que l'on va retrouver dans leurs grappes. S’il a plu, le vin nous le dit. Ce sont des vins vivants qui ont une certaine liberté". Et nous, on y goûterait bien à la liberté, non ?