Des parents à l’assaut des perturbateurs endocriniens !
Attention, vous allez traverser une zone de perturbations !
En octobre dernier, France Info révélait que des cas de malformations à la naissance s’étaient multipliés depuis une dizaine d’années dans trois départements français : l’Ain, le Morbihan et la Loire-Atlantique. En janvier, trois nouveaux cas groupés ont été signalés dans les Bouches-du-Rhône. À chaque fois, les bébés sont atteints d’agénésies, autrement dit, ils naissent sans mains et parfois sans avant-bras. Possiblement en cause ? Les perturbateurs endocriniens présents dans des pesticides auxquels les mères auraient été exposées pendant leur grossesse. Des substances chimiques qui miment, bloquent ou modifient l'action d'une hormone et perturbent le fonctionnement normal d'un organisme. Les effets de certains perturbateurs endocriniens sont néfastes sur l’organisme exposé mais également sur ses descendants. Le Professeur Charles Sultan, endocrinologue pédiatrique au CHU de Montpellier, a été le premier chercheur français à démontrer le lien direct entre ces perturbateurs et les malformations génitales chez le nouveau-né.
Il en distingue trois types chez les bébés de sexe masculin :
- l’hypospadias, soit l’orifice urinaire situé sur la face inférieure de la verge
- la cryptorchidie, soit le testicule non descendu dans la bourse
- les micropénis
"Nous sommes à l’aube d’un véritable scandale sanitaire"
Les travaux du Professeur Charles Sultan ont montré qu’en Languedoc Roussillon "un enfant dont les parents sont soumis à une pollution environnementale professionnelle a 444 fois plus de risques de présenter une malformation génitale qu’un enfant qui vit dans un environnement préservé." Par ailleurs, dans la région agricole du Nordeste au Brésil, "l’utilisation du DTT conduit à l’observation du taux de micropénis le plus élevé au monde."
Au-delà de ces cas de malformations génitales, la recherche montre aujourd’hui que les perturbateurs endocriniens agissent sur l’ensemble des tissus et organes du corps humain. Ils seraient à l’origine de nombreux troubles : problèmes d’obésité, de diabète, développements de cancers, de maladies chroniques, de fausses couches, d’infertilité… Ça fait froid dans le dos. Surtout lorsque l’on sait qu’ils s’immiscent à peu près partout - dans notre alimentation, nos cosmétiques, les objets plastiques, les produits ménagers (entre autres) - sous des noms barbares : bisphénol A, phtalates, parabènes, hydrocarbures aromatiques polycycliques… la liste est longue. Le Professeur Charles Sultan ne mâche pas ses mots. Pour lui : "Nous sommes à l’aube d’un véritable scandale sanitaire."
Mieux vaut savoir et agir en conséquence
Bien souvent inquiets pour leur santé et pour celle de leurs enfants, nombre de parents surmontent leurs peurs par amour, par envie. Mais cela nécessite quelques (grandes) adaptations.
"C’est très douloureux de se rendre compte de l’empoisonnement universel dans lequel nous sommes"
Pour Marine Jobert, journaliste et spécialiste des perturbateurs endocriniens, le choc est immense lorsqu’elle apprend les résultats d’une étude à laquelle elle participe au cours de sa grossesse. Le constat : son cheveu ne contient pas moins de 32 perturbateurs endocriniens sur 64 analysés. Elle est l’une des participantes les plus contaminées : "Personnellement, ça m’a chavirée. C’est très douloureux de se rendre compte de l’empoisonnement universel dans lequel nous sommes." Après l’inquiétude et le sentiment de culpabilité, la raison prend le dessus : "C’est à la fois terrible et un moment de vérité salutaire. C’était une période géniale pour reprendre en main sa vie et sa manière de consommer." Consciente des effets nocifs des perturbateurs endocriniens depuis longtemps, elle n’a pourtant jamais hésité à avoir des enfants : "Ce serait presque une victoire accordée à ceux qui nous conduisent vers l’abîme. De tout temps, l’humanité a vu des défis. Personnellement, j’espère élever des enfants qui, une fois grands, seront des gens… utiles." Aujourd’hui maman de deux enfants en parfaite santé, Marine est très attentive à leur exposition potentielle aux perturbateurs endocriniens et met tout en œuvre pour les éduquer à une consommation plus saine : "Manger exclusivement bio et bannir le plastique par exemple, c’est un combat quotidien, une ligne de conduite à tenir tous les jours."
Églantine, quant à elle, est une lectrice fidèle de Qu’est-ce qu’on fait ?! et a eu le courage de répondre à nos questions la veille de son accouchement. Elle nous a confié avoir appris, au deuxième semestre de sa grossesse, la malformation cardiaque de son bébé. Pour se rétablir, il devra subir une opération à cœur ouvert au cours des six premiers mois. Un coup de massue : "Même si on ne peut pas clairement faire le lien entre la malformation de mon bébé et une exposition aux perturbateurs endocriniens, je ne peux pas m’empêcher d’y penser." Déjà au courant des risques associés, cette épreuve marque un tournant dans sa prise de conscience : "Ce n’est pas une source d’angoisse mais plutôt un labyrinthe. On se rend compte qu’il faut être très vigilant, tout le temps." Une étape supplémentaire vers un mode de vie plus sain pour Églantine et son mari : "Avec l’arrivée d’un enfant, le temps devient une denrée rare et précieuse. On peut vite être tenté d’aller sur du tout-fait, du "tout, tout de suite". Mais parfois, prendre le temps de faire ou de s’interroger sur ce qu’on achète est essentiel." Un bel exemple de résilience.
- On participe à la consultation publique réalisée par le Ministère de la Transition Écologique et Solidaire et le Ministère des Solidarités et de la Santé en déposant un commentaire sur la plateforme dédiée.
- Et si on estime que ce n’est pas suffisant, on n’hésite pas à s’engager en adhérant à l’association Générations Futures qui milite contre l’usage des pesticides et autres chimiques. On va même plus loin en interpellant nos élus par mail et via Twitter grâce à l’outil mis en place par l’association.
- On dévore le livre de Marine Jobert et François Veillerette Perturbateurs endocriniens, la menace invisible paru en 2015 aux éditions Buchet/Chastel.
- On passe au 100% bio pour réduire la consommation de résidus de pesticides. C’est dur, mais faisable. On achète le moins possible de produits transformés et on passe un peu plus de temps dans la cuisine.
- On bannit les objets plastiques au maximum et surtout au contact de la chaleur. On évite bisphénol A et phtalates : yes ! Pour cela, on revient à des matières nobles : le bois, le verre et l’inox. Et on part à la recherche de produits de substitution : une brosse à dent en bambou ou des couvercles en tissu.
- On aère fréquemment notre chez-nous car l’air intérieur est 5 à 7 fois plus pollué que l’air extérieur. L'idéal est d'ouvrir les fenêtres 10 minutes par jour ! D’ailleurs, on peut lire l’infographie Qqf sur les produits ménagers.
- On essaye de réduire notre utilisation de cosmétiques et on se tourne vers des produits d’hygiène bio comme ceux proposés par La Réjouisserie, la boutique sans perturbateurs endocriniens.
- On s’éloigne des vignobles et des zones de culture fruitière pour éviter les pesticides en jetant un oeil à la carte de France de Générations Futures.
- On privilégie bicarbonate de soude, vinaigre blanc, citron et savon noir pour nettoyer notre logement et on suit les recettes du blog Les Yeux en Amande.
- On suit les 7 commandements de l’éco-orgasme de Générations Cobayes.