Comment transformer des clics en arbres ?

INTERVIEW DU DIRECTEUR D'ECOSIA FR
Comment transformer des clics en arbres ? sur Qu'est-ce qu'on fait
Avec 7 millions d'utilisateurs actifs et plus de 40 millions d'arbres au compteur, comment fonctionne Ecosia, ce moteur de recherche qui promet de planter des arbres ? Un clic, et ça pousse ? Ferdinand Richter, le superviseur d'Ecosia en France, nous explique comment le modèle économique d'Ecosia, au but non lucratif, permet d'investir 80% de ses bénéfices dans la reforestation.

Ecosia, tout le monde connait ! Mais saviez-vous que Christian Kroll, initiateur du projet, avait déjà mis en place un moteur de recherche vert, Forestle, en créant un portail sur la librairie de Google, mais sans sa permission ? C’est après s’être attiré les foudres du géant Google qu’est née Ecosia, la version licite du projet. Le moteur de recherche vert s’appuie sur la bibliothèque de Bing pour générer des fonds et les investir dans la reforestation. Récemment, l’entreprise a même proposé de racheter la forêt de Hambach en Allemagne pour la sauver de l’exploitation minière.

 

Planter des arbres à l’autre bout du monde est une mission complexe. Comment ça se passe exactement ?

Au sein de notre équipe, il y a des personnes spécialisées dans la reforestation. Peter, par exemple, est à la recherche, depuis une dizaine d’années, de projets locaux ayant montré des résultats concluants dans la restauration des écosystèmes. Dans l’idéal, ce sont les populations locales qui, après avoir démarré leurs projets, viennent vers nous pour des financements. En ce moment, nous soutenons un projet initié par des guides touristiques en Tanzanie. Ils voulaient protéger l’environnement en démarrant un projet de reforestation et nous ont contacté pour passer de 1 ou 2 millions d’arbres plantés à plus de 15.

 

Comment choisissez-vous les projets que vous soutenez ?

Tout le monde peut envoyer sa proposition via cette adresse mail : treeplanting@ecosia.org. Des zones de reforestation sont toutefois prioritaires : le bassin amazonien, l’Amérique du sud, le continent africain et l’Indonésie, où la biodiversité est très en danger. La gestion du projet est aussi un critère de sélection : ce n’est pas parce que vous avez l’intention de planter 1000 arbres que ça va marcher. Il faut avoir un projet déjà bien construit, avec un retour d’expérience et un plan de financement. Et puis Ecosia est un jeune acteur dans la reforestation, avec une petite équipe (environ 35 salariés), qui ne lui permet pas de se focaliser sur de tous petits projets. Il faut environ 50 000 arbres déjà plantés, pour qu’on envisage de financer le projet.

 

Comment vérifier les résultats de reforestation de ces projets ?

On se rend sur place, une fois par an, en fonction du nombre de projets. On travaille aussi de plus en plus avec l’imagerie satellite pour suivre les projets, parce que ce n’est pas facile, vu d’en bas, de se rendre compte de l’étendue du travail lorsqu’on plante des millions d’arbres.  Mais l’essentiel c’est de faire confiance aux populations locales, qui connaissent leurs terres et qui savent aussi au mieux comment en prendre soin.

 

Une entreprise à but non lucratif fait-elle figure de rebelle face au capitalisme  ?

On peut aussi parler de Robin des Bois, qui prend les sous des riches pour les donner à ceux qui en ont besoin. À l’initiative du projet, Christian Kroll s’est demandé où il y avait à la fois beaucoup d’argent et beaucoup de gens à impliquer : il a eu cette idée un peu folle d’associer la reforestation et un moteur de recherche car c’est un outils aussi puissant qu’indispensable de nos jours.

Et oui ! On peut vouer une entreprise à autre chose qu’à l’enrichissement et à l’exploitation de la planète. Un autre système est possible, dans lequel l’entreprise peut aussi être là pour faire du bien, pour rendre au lieu de prendre.

En octobre dernier, vous avez proposé de racheter la forêt de Hambach en Allemagne pour la sauver de l’exploitation minière auquel le géant de l’énergie, RWE, la destinait…Où en sont les négociations avec l’entreprise ?

On a fait une offre de rachat publique que RWE a directement refusé. Il n’y a pas eu de négociations. On cherche quand même des solutions pour empêcher l’aboutissement du projet ! Si vous avez des idées pour avancer sur ce sujet, n’hésitez pas à nous les partager ! La couverture médiatique a cependant renforcé la pression sur RWE et sur la commission de charbon en Allemagne.

 

Votre offre d’1 millions d’euros : un chiffre réel ou symbolique ?

On a fait nos calculs par rapport au prix auquel RWE avait acheté la forêt dans les années 1970. On a pris en compte l’évolution de son prix et on a rajouté 20%. Donc c’est un prix honnête par rapport à la valeur de Hambach. On a essayé de parler leur langage, un langage économique, mais, quand on voit ce que pourrait gagner RWE en exploitant cette forêt, on est loin du compte : on parle de milliards ! C’était une action coup de poing pour attirer l’attention sur cette problématique mais on avait quand même l’espoir que RWE accepte. Notre espoir a rapidement été ramené à la vérité.

 

Si jamais vous aviez fait l’acquisition de cette forêt, qu’en auriez-vous fait ?

Pour nous une forêt c’est un bien commun. L’idée c’est d’en refaire une réserve naturelle et de la rendre disponible à tout le monde.

 

Pour un impact encore plus positif sur l’environnement, incitez-vous les internautes à réduire leur consommation numérique ?

Aujourd’hui notre but premier, c’est de convaincre le grand public de faire un geste pour la planète. J'ai été dans une université récemment, et je peux vous dire que la moitié des étudiants sont très conscients de l’écologie, et que l’autre moitié s’en fout complétement. Le défi c’est de ne pas les braquer et de leur dire : « écoute, tu peux quand même faire un petit geste pour la planète, mais je ne vais pas t’embêter pour changer du tout au tout ». Si demain un grand nombre de personnes utilise Ecosia, on pourra se permettre d’être plus incisif sur la réduction de la consommation numérique. Mais pour le moment, on soutient plutôt des démarches zéro déchets, minimalistes, en partenariat avec des youtubers pour aller dans ce sens.

Anaëlle B
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