La procréation politiquement assistée, une affaire d'État !

POLITIQUES DÉMOGRAPHIQUES
La procréation politiquement assistée, une affaire d'État ! sur Qu'est-ce qu'on fait
Pour la première fois en 70 ans, la population de la République Populaire de Chine reculait de 1,27 million de personnes l'an dernier. Pourtant, la politique de l'enfant unique y était définitivement abandonnée en 2015. Désormais, les foyers peuvent compter jusqu'à 2 enfants ! Le contrôle des naissances de l'Empire du Milieu a toujours questionné, mais y a-t-il qu'en Chine que les politiques se préoccupent de la descendance de leurs concitoyens ?

Le gouvernement de la République Populaire de Chine s’inquiète de l’évolution démographique du pays depuis le premier recensement réalisé en 1953 et qui révèle aux autorités une population bien plus importante que prévu. S’en suivent alors plusieurs campagnes de contrôle des naissances, dont la fameuse politique de l’enfant unique adoptée en 1979. Ce n’est toutefois pas à cette mesure phare que l’on doit les résultats les plus significatifs. Avant elle, le nombre d’enfants par femme est passé de 6,40 en 1965 à 2,75 en 1979, divisant le taux de fécondité par 2,3 en seulement 14 ans. Cette forte baisse est due à la campagne « wan, xi, shao » qui se résume en trois consignes – se marier tard, espacer les naissances et réduire sa progéniture. Ces règles auraient été difficilement applicables sans l’avortement et la contraception, facilités en 1962. La politique de l’enfant unique, quant à elle, a contribué à abaisser le taux de fécondité jusqu’à 1,6 en 2015, soit une division par 1,7 du nombre d’enfants par couple en 26 ans.

« Avec l’augmentation du coût de la vie, les couples limitent spontanément la taille de leur descendance. »

Les enfants, vrai investissement pour les parents

Cette volonté politique d’endiguer l’expansion démographique devait permettre à toute une génération de s’élever dans la société. La famille étant vue comme une cellule économique, la mesure prévoyait qu’elle concentre ses investissements sur un enfant unique en vue de lui assurer un futur plein de promesses et d’opportunités. Cet état d’esprit a perduré en Chine où les couples ont toujours moins de 2 enfants, surtout en ville. À Shanghai par exemple, le taux de fécondité a même atteint 0,7. Le nombre de naissances a ainsi décliné sur l’ensemble du pays de 2,5 millions l’an dernier. La persistance de ce phénomène s’explique en partie par l’envolée des coûts liés à l’éducation d’un enfant, à sa scolarité et à sa santé, ainsi que par le désengagement de l’État sur le volet social. « Avec l’augmentation du coût de la vie, les couples limitent spontanément la taille de leur descendance. En matière de limitation des naissances, les contraintes socio-économiques et les nouveaux modes de vie, plus centrés sur l’épanouissement personnel et la réussite professionnelle des individus, prennent donc progressivement le pas sur le contrôle politique » souligne Isabelle Attané, dans son article « L’enfant unique en Chine ». Cette conception de la famille comme une charge économique s’est en quelque sorte aussi répandue dans les pays occidentaux. En effet, le taux de fécondité aux États-Unis n'avait pas été aussi faible depuis 40 ans et nombreux sont les pays à voir également le leur diminuer.

« En 1945, la France était le pays le plus vieux au monde ».

Un investissement qui peut être soutenu par l’État

Dans ce domaine, la France fait figure d’irréductible Gauloise, l’Hexagone étant le pays le plus fécond d’Europe, même si, comme le rappelle Anne Salles, démographe et maîtresse de conférences à la Sorbonne, cela n’a pas toujours été le cas : « Il faut savoir que la France a connu l’une des fécondités des plus basses au monde pendant 200 ans, du milieu du XVIIIe siècle, à la fin de la 2e Guerre Mondiale. En 1945, la France était le pays le plus vieux au monde ». Il en a découlé une tradition de politique de soutien à la natalité. Le nombre d’allocations, leur somme et leur progressivité incitatives sont des éléments importants de la politique familiale française mais c’est surtout par la prise en charge des enfants que la France se distingue. Anne Salles précise : « Les salles d’asiles ont été mises en place dès le milieu du XIXe siècle, pour accueillir les enfants, souvent d’ouvriers et parfois extrêmement jeunes, qui erraient dans les rues toute la journée. »  Cette initiative, d’abord privée, inspirée par les infants schools du Royaume-Uni et importée en France par Madame de Pastoret, a été reprise presque tout de suite par les pouvoirs publics qui ont voulu en faire un espace d’éducation. C’est chose faite en 1881 avec la création de l’École maternelle ! Cette institution, proposée gratuitement, offre aujourd’hui un excellent taux de couverture, ce qui permet aux parents de retourner au travail plus rapidement, et de concilier ainsi vie professionnelle et familiale. C’est par contre moins le cas en Allemagne où les places sont chères dans les Kindergarten, au sens propre comme au figuré.

Investir dans les enfants, le bon plan ?

Parce qu’ils sont la population active de demain, celle qui va générer de la richesse et payer les retraites ! Dans un contexte généralisé du vieillissement de la population (1 Français sur cinq a plus de 65 ans), le renouvellement des générations n’est pas à négliger. Pour Anne Salles, « le vieillissement de la population est un risque évident pour l’état social en France qui finance le système de santé et de retraites. S’il y a moins d’actifs pour l’alimenter, cela devient compliqué. Ça l’est déjà, mais ça va s’accentuer. Financer les retraites des baby-boomers sera surtout problématique pour les 30 prochaines années. Après cette génération, cela devrait se stabiliser. »

À la question faut-il continuer à faire des enfants, le système français de financement des retraites par redistribution répondrait certainement oui. De son côté, Anne Salles répond « On ne peut pas vraiment faire un calcul mathématique et dire que, parce que dans le monde, la démographie augmente trop rapidement, il faut fortement la réduire en France. Ça ne marche pas comme des vases communicants ! Il va bel et bien falloir que notre pays puisse fonctionner et ça ne marchera pas avec une fécondité trop basse ». La stabilité démographique (aux alentours de 2 enfants par couple, soit le seuil de renouvellement des générations) apparaît alors comme l’une des conditions sine qua non du maintien de la croissance économique.

« Ce sera à l’économie de s’adapter à la démographie, et non l’inverse »

Quant à Didier Blanchet, il estimait déjà en 2001 dans son article « L'impact des changements démographiques sur la croissance et le marché du travail : faits, théories et incertitudes » qu’« une chose est certaine : un objectif de croissance démographique soutenue reste insoutenable à long terme. Il faudra donc faire, un jour ou l’autre, avec les conséquences du retour à la stationnarité, et notamment ses conséquences sur ce vieillissement qu’on peut qualifier d’incompressible, car lié à l’évolution de l’espérance de vie. Au moins sur ce point, ce sera à l’économie de s’adapter à la démographie, et non l’inverse ». Corriger le problème du vieillissement de la population par l’augmentation des naissances (au-dessus de 2 enfants par couple) revient à reléguer le problème à plus tard, car les enfants nés demain seront les personnes âgées d’après-demain. Dans cette optique, l’immigration est aujourd’hui perçue comme économiquement utile lorsqu’elle est qualifiée. Les réponses structurelles et économiques à apporter à l’augmentation du nombre de personnes dépendantes sont donc encore à déterminer, à moins de basculer dans un système plus libéral. Un système libéral qui lui incite à moins procréer. C’est quoi l’expression déjà ? … Ah oui, c’est le serpent se mord la queue !

Les réponses macroéconomiques ne sont donc pas simples mais nous à notre échelle, qu’est-ce qu’on fait?

  • On profite du grand débat national pour soumettre notre solution pour prendre soin de nos aînés.
  • On fait 2 enfants, pour atteindre le taux de renouvellement des générations, si on est inquiet pour sa retraite.
  • On ne fait pas d’enfant, mais on en profite pour en mettre de côté pour notre (maison de) retraite.
  • On peut parcourir cet article pour approfondir les liens qu’il y a entre économie et démographie.
  • On regarde le documentaire « un monde sans femme », qui retrace les répercussions alarmantes de la politique de contrôle des naissances dans quelques pays d’Asie.
Tristan Bouvier
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